Il est toujours intéressant de lire "l'autre version" par rapport à "notre" histoire:
Maurice Genevois dans "ceux de 14" relatant les premiers combats de la Grande Guerre jusqu'aux sanglants échanges des Eparges parle la même langue qu'Ernst Junger dans "Orages d'acier", "Ils arrivent" de Paul Carell expliquant l incapacité à réagir au déluge de moyens du D Day coté allemand rendant le soldat allemand plus humain, sans rien oublier bien sur ...
De même grâce à ce livre de 300 pages on est frappé par les fortes similitudes d'impression avec les chroniques et autres souvenirs des chrétiens: le sentiment d'être envahis par des barbares qui viennent envahir une terre sacrée, sans éducation, sans connaissance médicale, sans raffinement.
Deux choses sont particulièrement utiles à la compréhension de la durée de présence "franj" ( pour reprendre la terminologie arabe ) en Terre Sainte:
- Le monde musulman est profondément divisé, déjà, entre sunnite et chiite, la concurrence est forte entre arabes et turcs et entre eux. Ainsi, alors même que la perte de la bataille de Hattin par Guy de Lusignan aurait du jeter à bas le royaume, celui ci a perduré encore un siècle. Le "franj" n'apparait plus comme l ennemi, mais comme un ennemi parmi d'autres, et comme il est affaiblit il n'est pas prioritaire de l'abattre, d'autres combats fratricides attendent les descendants de Saladin.
Bien souvent, et d'ailleurs dès la première croisade, si des chrétiens se battent entre eux, des musulmans se battent aussi entre eux, et les uns s'associent volontiers avec les autres dans ces combats.
Au fil du temps le chrétien n'est plus au centre du djihad, mais un habitant comme un autre.
- Les Templiers ne sont pas des "franjs" comme les autres: ils font tantôt peur au point d'être parfois systématiquement tués quand ils sont capturés, comme à Hattin, ou avec les Hospitaliers ils sont tous décapités ( 300 ). Ils fascinent aussi: par leur organisation et par leur compréhension du monde musulman.
Le chroniqueur Oussama Ibn Mounqidh écrit en 1138: " Quand je visitais Jerusalem j'avais l'habitude de me rendre à la mosquée al-Aqsa, lieu de séjour de mes amis Templiers ... ".
Les Templiers mettent une partie de l'Eglise à sa disposition pour qu'il puisse faire ses prières en direction de la Mecque, et le défend quand un franj nouvellement arrivé d'occident l'attrape pour l'obliger à prier autrement.
Un musulman qui va voir ses amis chrétiens au XIIème siècle, qui se sont installés dans une mosquée, transformée en église,des Templiers qui protègent un musulman qui prie sa religion dans une église tournée vers la Mecque ... on est pas loin de la définition de la tolérance ...
Passionnant ...